A la suite des allégations des violations et atteintes relatives aux droits de l’Homme en lien avec les manifestations du 31 décembre 2017 et 21 janvier 2018, a été créée par Madame Marie-Ange MUSHOBEKWA, Ministre des Droits Humains de la République Démocratique du Congo suivant l’Arrêté ministériel n° 001/CAB/MIN/DH/2018 du 1er février 2018 ; une commission d’enquête, dénommée Commission d’Enquête Mixte-3121.

Présidée par Madame Marie-Ange MUSHOBEKWA, Ministre des Droits Humains et Maître Georges KAPIAMBA, rapporteur désigné par la société civile.

La CEM-3121 est composée de : 5 délégués du Ministère des Droits Humains, 2 délégués du Ministère de la Justice et Garde des Sceaux, 3 délégués de la CNDH, 6 délégués de la société civile, 1 délégué du BCNUDH (membre observateur), 1 délégué du Bureau de liaison de l’UA (membre observateur).

Ces allégations ont été à la base de la consultation que le Gouvernement de la République Démocratique du Congo, à travers le Ministère des Droits Humains, avait entreprise avec des organisations de la Société Civile en vue de les collecter, les vérifier et faire poursuivre en justice leurs présumés auteurs.

Après des travaux qui se sont déroulés du 5 février 2018 au 10 mars 2018, na CEM-3121 a publié un rapport qui revient sur : le contexte sociopolitique de la République Démocratique du Congo ; la méthodologie de travail ; le cadre légal de l’organisation des manifestations publiques, du maintien de l’ordre public, du droit à la vie, du droit à l’intégrité physique, du droit à la liberté et la sécurité de la personne, du droit à la liberté de culte, de la liberté de mouvement, du droit à la propriété privée, du droit à la justice, du droit à la santé ; les violations et atteintes des droits de l’homme constatées ; les actions prises par le Gouvernement sur recommandation de la CEM-3121 ; conclusion et recommandations.

Ce rapport dont La CEM-3121 souhaite qu’il soit une base d’enquêtes judiciaires à l’encontre des présumés auteurs et complices des violations et atteintes des droits de l’Homme en vue de contribuer à la lutte contre l’impunité en République Démocratique du Congo.

Dans un contexte socio-politique, ce rapport reconnait que depuis septembre 2016, la République Démocratique du Congo traverse des moments de turbulence liés au processus électoral sur l’ensemble du territoire national. Cette situation a eu des répercussions sur le respect et la protection des droits de l’Homme. Les types de violations et d’atteintes aux droits de l’Homme les plus enregistrées sont : Violations aux libertés d’association, de réunion et de manifestation ; Violations à la liberté d’expression et d’opinion ; Violations et atteintes au droit à la vie, à la sécurité de la personne humaine ; Violations et atteintes à la propriété privée ; Pillages, destruction méchante, intolérance, incitation à la haine et à la violence.

« Il a été rapporté et constaté que certains hôpitaux et maternités ont fait l’objet des attaques par gaz lacrymogène mettant ainsi la vie des nouveau-nés et des malades en danger. Concernant les officiels, les Autorités responsables de la 14ème Région Militaire des Forces Armées de la République Démocratique du Congo (FARDC), de la Garde Républicaine (GR) et du Commissariat Provincial de la Police Nationale Congolaise (PNC) ont été invités pour donner leurs versions de fait à la CEM-3121. Seul le Commissariat Provincial, à travers le Général Sylvano KASONGO a répondu par écrit comme suit : J’ai tenu des causeries morales avec les hommes sous mon commandement et signé des ordres de service respectivement n°137/2017 du 30 décembre 2017, n°007/2018 du 19 janvier 2018, auxquels mes subordonnés ont été scrupuleusement instruits sur le maintien d’ordre public dans le respect des Droits humains avec comme consigne ferme la non utilisation des armes à feu. Le Général KASONGO a poursuivi : la plupart des manifestants, habillés en culottes et tenant des armes blanches, n’étaient pas des fidèles catholiques mais plutôt des partisans des partis politiques de l’opposition scandant des chants obscènes et des insultes à l’endroit des forces de l’ordre… » Peut-on lire dans ce rapport.

La CEM-3121 a recensé 14 (quatorze) morts à savoir, 7 (sept) le 31 décembre 2017 et 7 (sept) le 21 janvier 2018 dont 12 par balles et 2 (deux) par asphyxie des gaz lacrymogènes. 40 (quarante) cas de personnes arrêtées, détenues, torturées et/ou soumises aux traitements cruels, inhumains et dégradants à l’occasion des manifestations du 31 décembre 2017 et 21 janvier 2018 dont 2 (deux) femmes.

Elle déplore également la détention des personnes arrêtées en lien avec les manifestations, pendant plusieurs semaines voire des mois, par les services de défense et de sécurité sans être présentées devant leurs juges naturels à l’expiration du délai de la garde à vue. Les Officiers de Police Judiciaire de la PNC, l’ANR et l’ex-DEMIAP doivent respecter les limites de leurs compétences ainsi que les attributions des Officiers du Ministère Public. A cet effet, l’article 67 de la loi organique n° 13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétences des juridictions de l’ordre judiciaire dispose qu’en matière répressive, le Ministère public recherche les infractions aux actes législatifs et réglementaires qui sont commises sur le territoire de la République. Il reçoit les plaintes et les dénonciations, accomplit tous les actes d’instruction et saisit les Cours et tribunaux.

La Commission d’Enquête Mixte-3121 rappelle dans son rapport que les droits de se réunir et de manifester pacifiquement sont prévus aux articles 25 et 26 de la Constitution. L’article 25 dispose que : « La liberté des réunions pacifiques et sans armes est garantie sous réserve du respect de la loi, de l’ordre public et des bonnes mœurs ». Article 26 : « La liberté de manifestation est garantie. Toutes les manifestations sur les voies publiques ou en plein air, imposent aux organisateurs d’informer par écrit l’Autorité administrative compétente. Nul ne peut être contraint à prendre part à une manifestation. La loi en fixe les mesures d’application ». Par ailleurs, les citoyens qui participent à une manifestation publique doivent respecter la loi avant, pendant et après la manifestation en évitant des discours d’incitation à la violence, la haine raciale ou ethnique, la destruction ou pillage des biens publics ou privés. Elle déplore aussi l’absence de la loi devant fixer les modalités pratiques de l’exercice des libertés garanties par les articles 25 et 26 de la Constitution, le décret de 1999 étant devenu anticonstitutionnel et tombé en désuétude.

Cependant malgré ce grand travail accompli par cette commission, le résultat attendu ne sera pas à l’échelle des attentes pour plusieurs raisons. Ces manifestations avaient lieu dans toutes les grandes villes du pays, et les mêmes scènes avaient étés observées. A Goma, par exemple, ceux qui avaient étés arrêtés lors de la manifestation du 21 janvier croupissent encore à ce jour en prison.

Djaffar AL KATANTY

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